L a jurisprudence vient de rendre un arrêt sanctionnant d’atteinte à la vie privée un « outing » réalisé sur le net via le réseau social instagram : outer, un coming out forcé même virtuel devient illégal.
Une décision prise en référé
Le coming-out consiste à révéler son orientation sexuelle à ses proches, néanmoins le lobby LGBT s’est toujours battu pour que soit reconnu comme infraction pénale le « outing », le fait d’ « outer » une personne : révéler son orientation sexuelle au public sans son consentement.
Une décision en référé vient de sanctionner le outing le qualifiant de « incontestable atteinte à l’intimité de la vie privée laquelle ne se trouve en rien justifiée par la liberté d’expression ».
En l’espèce un homme a révélé l’homosexualité de deux ex-amants sur le réseau social Instagram avec historiques, captures d’écran et photos à l’appui, ses deux amants ont alors porté l’affaire en justice par référé.
Une jurisprudence s’inscrivant dans une certaine continuité
Cette jurisprudence fait notamment suite à l’affaire Phillipot contre Closer, du nom de l’homme politique Florian Phillipot dont l’homosexualité avait été révélée suite à la divulgations de photos privée avec ce qui semblait être un amant par le magazine Closer. Le magazine people avait été condamné.
La Cour d’appel de Paris avait finalement condamné le magazine people à verser 20.000 euros de dommages et intérêts à l’ancien vice-président du Front national devenu depuis président du parti Les Patriotes.
Ses avocats avaient déclaré :
« Outer, c’est stigmatiser. Et après la sexualité, que va-t-on livrer en pâture au public, la religion, la santé ? »
Cette décision étend donc cette décision liée à la presse papier sur le monde virtuel des réseaux sociaux et ici en l’espèce Instagram.
Le outing doit-il être illégal ?
La question est sujet à débat, notons qu’ici même si cela a été reconnu la jurisprudence s’est surtout fondé sur la divulgations d’historique whatsapp, de captures d’écran et de photos pour qualifier l’infraction.
Quid si le outing avait été basé sans éléments extérieurs ? Dans le cas où la diffamation n’aurait pas été retenue et que la victime décide de divulguer son homosexualité, le outing serait il en lui même une atteinte à la vie privée justifiant une condamnation pénale ?
Est-ce également raisonnable dans un monde où la liberté d’expression ne fait que de reculer ? Ne devrait-on pas uniquement tenir compte du préjudice subi par juridiction civile et non ériger ce comportement en infraction ? En quoi la société est-elle atteinte par ces faits ?
Cette décision va t-elle se porter également aux révélations publiques de séropositivité ?
La portée du outing
Notons que l’arrêt ici tient compte de l’individualité des victimes : celles ci étaient musulmanes, il y aurait donc eu un préjudice subi du fait de l’appartenance de leurs familles respectives à cette religion jugée peu tolérante envers la communauté LGBT.
Rappelons que interrogé sur l’homosexualité, Muhammed Salih al-Munajjid répondi par une série de hadiths dont l’un ordonna
Quand vous trouvez quelqu’un en train de se livrer à la sodomie, tuez les deux personnes impliquées dans l’action
Non seulement l’infraction d’atteinte à la vie privée a été retenue mais en plus un préjudice moral a été reconnu, condamnant l’auteur à verser à ses anciens compagnons 10 000 € et 7 000 € de dommages et intérêts à chacun sans compter les 2 500 € de dépends.
Le tribunal a par ailleurs ordonné l’exécution provisoire de sa décision.
Il ne s’agit que d’un référé, nous en saurons plus au moment du jugement sur le fond…
Pour en savoir plus
La décision :
https://www.legalis.net/jurisprudences/tgi-de-paris-ordonnance-de-refere-du-15-mai-2019/